Un petit tour à Nishijin, le quartier des tisserands
Comme Kyôto a été la capitale impériale du Japon pendant plus de mille ans, toute une gamme de métiers de l'artisanat relatifs aux activités de la cour s'y est développée. Parmi ceux-ci, l'art du tissage des kimonos et autres obis (les larges ceintures portées sur les kimonos).
Hier, je suis donc allée me balader dans Nishijin afin d'admirer les boutiques de soieries, et surtout pour visiter un petit musée caché dans une toute petite rue excentrée. Le quartier, situé dans le Nord-Ouest de Kyôto, m'a beaucoup plu : c'était très agréable d'aller me perdre dans les innombrables ruelles, si typiques de la ville, et d'admirer l'esprit traditionnel que les maisons ont conservé dans le coin. Il y avait un côté village qui flottait dans l'air, on n'entendait pas les voitures circulant sur les grands axes pourtant proches... C'est ce qui fait tout l'esprit de Kyôto : au premier abord ça peut sembler une grande ville de plus, pleine d'une foule de vélos et de voitures, mais dès qu'on bifurque ne serait-ce qu'une fois dans une ruelle perpendiculaire, on se retrouve dans un autre monde et on peut pédaler longtemps à travers les petites rues soudain calmes avant de retomber sur une grosse artère... C'est une ville de contrastes !
Le musée en lui-même, consacré au tissage et abritant une collection de costumes de Nô (un art théâtral japonais sur lequel j'avoue ne rien connaître), est situé dans une jolie maison traditionnelle qui a appartenu à un important tisserand.
La maison d'en face était aussi d'architecture traditionnelle, probablement un ryokan (auberge traditionnelle). Dans le jardin, deux hommes secouaient un prunier au-dessus d'une bâche pour récolter ces fruits si populaires au Japon.
J'ai commencé par retirer mes chaussures sur le pas de la porte avant de m'aventurer sur le beau parquet ancien. A l'intérieur, une dame très aimable m'a donné des prospectus explicatifs en anglais, puis m'a expliqué une foule de choses en japonais, qui devaient être fort intéressantes mais dont malheureusement pour moi je n'ai compris qu'un dixième, et encore... Elle m'a montré des pièces brodées à la main ou à la machine, m'a expliqué quels costumes étaient portés par qui (j'ai juste réussi à comprendre si c'étaient des hommes ou des femmes). J'avais l'impression d'être la seule dans le petit musée...
Après ces premières explications, je suis montée seul à l'étage, où une jolie salle tapissée de tatamis et aux fenêtres coulissantes ouvertes sur une petite cour intérieure très zen permettait d'admirer des costumes anciens.
Ensuite, à ma grande surprise car je n'avais pas compris les explications de la dame au début, j'ai eu droit à une visite de l'atelier de tisserands installé à l'étage de la maison !! Nous n'étions que deux visiteurs, c'était donc une sorte de visite privée, la grande classe... La dame nous a emmenés dans un atelier sous les toits, empli à craquer de métiers à tisser traditionnels en bois, de patrons et bobines de fil, et résonnant du claquement des métiers et du pépiement de la radio. Une poignée d'ouvriers, certains habillés en kimono, s'affairaient à la main sur des métiers apparemment très proches de ceux utilisés au même endroit il y a 200 ans... Malheureusement je n'avais pas le droit de faire de photos de l'atelier !! Dommage, car ça valait le coup d’œil.
Un homme était assis à l'un deux, tissant une étoffe ornée d'un motif traditionnel de fleurs et de papillons, apparemment à vue. Il s'est arrêté exprès pour nous et nous a fait une présentation de son travail, nous expliquant tout un tas de choses qui avaient l'air passionnantes mais dont je ne saisissais presque rien. Quelle frustration !! Il nous a fait toucher différents tissus, admirer comme la couleur de chaque fil varie selon la lumière, et finalement fait une démonstration. C'était vraiment, vraiment bluffant de le voir faire. Je n'arrivais absolument pas à comprendre comment il savait quel fil passer où et à quel moment... Et quelle minutie ! Il faut un temps de travail incroyable pour ne tisser ne seraient-ce que quelques cm d'étoffe. J'étais ébaubie... Après cette démonstration, il nous a encore expliqué d'autres choses et fait visiter la salle où sont exposés leurs produits finis. En tout, il a dû nous consacrer 20 ou 30 minutes, c'était carrément un honneur...
Après ça, deuxième surprise : j'ai été invitée à aller me délasser un peu dans la salle de thé, où je pouvais me servir à volonté d'un délicieux ban-cha fumé et où la dame de l'accueil m'a apporté un petit okashi, une friandise traditionnelle aux fruits secs et au matcha (poudre de thé vert) sur une jolie assiette. Agenouillée sur un coussin face à la petite cour zen et sa fontaine, feuilletant un beau livre sur les kimonos, j'avais l'impression d'être au paradis... Ils savent y faire, ces Japonais ^^ En plus, le musée allait bientôt fermer alors j'étais seule. Un vrai havre de tranquillité.
Après cette très agréable visite, je suis allée à un autre centre textile plus grand, situé sur une grosse artère. Il y avait une très grande boutique et quelques expositions, mais l'ensemble était assez décevant après ce que je venais de voir...
Ensuite, vers 17h, je me suis enfoncée encore plus avant dans le labyrinthe de petites rues des quartiers Nord, presque jusqu'aux collines qui délimitent la ville au Nord. J'ai fini par trouver (à grand peine) ce que je cherchais : le plus vieux sentoo de Kyôto. Le sentoo, ce sont les thermes à la japonaise ; il y en a un certain nombre dans la ville, mais il paraît qu'aucun n'égale leur aîné, le Funaoka Onsen. Laurent et moi nous y étions donné rendez-vous à 18h30, après ses cours...
Comme il me restait du temps, je me suis posée dans un café-resto non loin de là, qui était apparemment aménagé dans un ancien sentoo très semblable au Funaoka Onsen ! Le bâtiment était superbe, tant de l'extérieur que de l'intérieur. Les murs y étaient tapissés de carrelages fleuris très colorés, que j'ai reconnus plus tard en allant me baigner au sentoo.
Malheureusement, les couleurs ne rendent pas très bien : ça paraît vert, mais en réalité c'était tout rose et bleu !
Attaché par une laisse sur le trottoir, un gros chat tout rond attendait sagement que sa maîtresse ou son maître aie fini de barboter.
C'est vraiment dommage que je n'aie pas pu faire de photos à l'intérieur du sentoo, car c'était absolument magnifique. Les carrelages y étaient encore plus beaux que dans le café, très variés et colorés, avec des fleurs partout... Le reste du bâtiment était tout en bois et les plafonds étaient superbes. Dans le vestiaire, il y avait des bas reliefs sur les murs représentant une pinède, des oiseaux et divers personnages, et du plafond nous contemplaient samouraïs et tengu (dieu au visage tout rouge et au très long nez) gravés et peints. Une merveille.
Outre la grande pièce intérieure et ses différents bassins, il y avait une petite cour avec une minuscule marre entourée de gros rochers, de plantes vertes et de sculptures en pierre, ainsi qu'un bain tout en bois où l'eau chaude coulait d'un tuyau en bambou. Aaaaaaaaahhh...... L'art du sentoo !!
Voilà, c'était ma petite journée d'hier. Aujourd'hui, mercredi, je me fais encore une thématique artisanat : je vais visiter la maison d'un célèbre potier transformée en musée, ainsi que le centre de l'artisanat de Kyôto.
Bisous à tous :)